Bravo à la petite fille qui danse !
J'ai visionné, re-visionné, re-re-visionné la vidéo de la petite fille qui danse sur le podium au Champs-de-Mars, je n'arrive pas à y voir tout le mal que l'on veut me faire voir. Elle danse comme on lui a appris à danser (au kindergarten, à la télévision, à sa classe de danse, chez elle, dans son quartier etc.) Elle reproduit ce qu'elle voit et ce qu'on apprécie de nos jours. Le rabòday étant une danse nationale fort prisée. Devra-t-on le considérer comme une danse obscène maintenant? Que le Sénateur Zokiki propose la loi sur les traditions et les rites à enseigner aux mineurs ou pas!
Qu'est-ce que je vois sur cette vidéo? Une foule assoiffée de divertissement, un président populaire ou populiste (cela revient souvent au même), un père très fier de sa fille (qui a surement aussi bien dansé pour sa graduation), un peuple -en mal de héros- voyant dans cette petite fille une merveilleuse histoire d'une des leurs (pitit sor Yèt) raflant une voiture neuve des griffes d'un pouvoir/des riches (les commanditaires, les sponsors) pas souvent généreux, une fillette contente de faire valoir son talent. Rien d'obscène, si ce n'est la misère, celle qui nous pousse à accorder une aussi grande importance à un petit fait divers de rien du tout.
Certains amis Facebook, grands manipulateurs des faits, font courir le bruit que le Président transforme cette enfant en "stripteaseuse de rue", sans égards pour cette enfant, qui a cru innocemment bien faire. Je n'aime pas le Président Jovenel Moïse, mais entendons-nous, de quel côté sommes-nous? Du côté de ce père et de sa fille, qui vivent une belle histoire, ou du côté des aigris du pouvoir, qui règlent leur compte avec les chefs en place?
Ceci dit, telle fille de telle famille danserait aussi bien sur la scène d’America get talents, elle serait applaudie sur tous les réseaux sociaux. Telle fille de telle famille danserait aussi bien sur la scène du Karibe KonventionCenter, on la féliciterait pour son talent, on l'encouragerait à prendre des cours de danse, telle école de danse lui aurait accordé une bourse d'étude... Telle fille de telle autre famille ne serait jamais sur la scène du Champs-de-Mars à pareille heure (21 heures passées) me dira-t-on... Mais accompagné de son père, qui n'avait pas planifié de se retrouver sur scène, on ne sait jamais... si certains quartiers du pays n'étaient pas devenus la chasse gardée de certains gangs et de certains politiques, qui y font régner la terreur pour mieux régler leur petite combine (enlèvements, vols, viols, trafics de drogues, vente d'armes, recels).
Alors, attaquons les vrais problèmes. On a marre des brouillons populaires/populistes de nos politiques (depuis le Papa-bon-cœur Alexandre Pétion) qui négligent les affaires de l'Etat et tentent de se faire oublier en nous racontant des histoires à dormir debout comme celles-là, aussi belles soient-elles! On a marre de cette misère qui nous conditionne à régler les problèmes du manger et du boire au jour le jour au lieu de réfléchir ensemble sur la société haïtienne de demain. On a marre de cette classe de nantis rentiers, importateurs de fatras de la poubelle des pays industrialisés qu'ils nous revendent au prix fort. On a marre de cette classe politique bidon, sénateurs et députés de la République, profiteurs des mamelles du Trésor Public toujours en campagne électorale (inauguration de marché, de pompe à eau, de puits artésiens) tout en délaissant les questions de salaire minimum, de transport en commun, de suivi du budget national, d'accords internationaux, de protection sociale, de droits humains (ceux des femmes en particulier), de lois désuètes, etc. On a marre du chômage, de l'insalubrité, de la vie chère, de l'absence de service public, de la corruption, de la dégradation de l'environnement... On a marre d'avoir marre. Ne nous laissons pas distraire par les faits divers. On ne me balancera pas d'un populisme à l'autre, posons les vrais problèmes.
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