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Une main comme une balle
pour Junia
Mais comment savait-elle que j’avais besoin de
ce geste-là, à ce moment-là?
Le drap a un peu glissé, découvrant mon épaule
gauche nue. La chaleur de mon corps a pris un coup de froid. Blotti au creux de
ma somnolence ravie, j’avais comme la sensation d’une glace pénétration dans la
chair de mon épaule. C’est alors que je sentis sa paume et ses doigts. J’encaissai
le choc dans la grange de ma mémoire.
Elle a déposé sa main sur la masse de mon
épaule, a serré ses doigts sur le triangle de mon deltoïde comme pour me dire
combien elle tient à moi, à cet instant que l’on partage, à ce dormir ensemble
sous le même drap, et diffusément sa paume chaude de tout son amour, de toute
la tendresse qu’elle a pu trouver dans son cœur meurtri par les déceptions et
les désillusions de la vie, sa paume chaude d’elle-même condensée, ramassée, emballée
comme un cadeau dans sa main, a fondu le froid de mon épaule.
Elle a glissé sa ma main lentement sur mon
bras. Pensant me caresser, elle suivait le trajet de ma froide crampe insidieuse
traquée par cet amour d’une femme désespérément accrochée à un homme que le
jour va lui voler.
Les filles d’un soir sont souvent des folies. Je
ne parle pas des filles qui nous passent de la joie contre leur solitude qu’elle
désire meubler comme une caisse d’épargne. Les filles d’un soir, celles qu’on
rencontre juste une fois, qu’on salue, avec qui on discute de choses et d’autres,
à qui soudain on fait confiance comme à une vieille amie intime, à qui on ne
demande rien, on ne promet rien, qui se livre nue, corps et âme, juste une nuit
hors temps. Folie, vous dis-je.
Quand elles déposent leur paume chaude sur
votre angoisse devenue docile tout à coup, quand elle tue en plein cœur votre
vague à l’âme, quand elles vous réconcilient avec vous-même en fondant votre
désespoir dans la braise intime de leur corps, vous damneriez votre âme pour
arrêter le temps.
Wêchévains, DJAB
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